La Nuit de plomb (Die Nacht aus blei)
(Seuil, 1963)

Dérive dans un univers flou et crépusculaire, purgatoire aux frontières impalpables, ce récit poétique narre les errances d’un jeune homme guidé par un ange entre plaies et viols, bordels et souterrains. Maintes fois adapté en musique et au théâtre, ce récit d’un cauchemar a été publié de façon posthume, mais c’est à l’origine un fragment du dernier roman de Jahnn, Nul n’y échappe (Jeden ereilt es), toujours inédit en français.

Hans Henny Jahnn

Fils d’un constructeur de bateaux, Hans Henny Jahnn (1894-1959) était facteur d’orgue et éditeur de musique. Il ajoutera un « n » à son nom de famille par admiration pour le bâtisseur de cathédrales Jann von Rostock, qu’il considère comme son ancêtre. À 18 ans, il a déjà écrit cinq pièces majeures. Ses livres, proches d’un certain expressionnisme, font penser à une sorte de Kafka intérieur ; son œuvre est largement fondée sur une angoisse existentielle liée à l’amour et à sa perte. Passionné par les îles (Amrum, Rügen) dont il explore les cryptes et les vieilles églises avec son meilleur ami Harms, il est mystique à l’adolescence. En 1914, alors qu’il vient d’obtenir son bac, il se soustrait au recrutement et s’établit au bord d’un fjord en Norvège, où il fait des plans d’architecture monumentale. Il imagine une gigantesque société artistique et religieuse, tournée vers l’architecture (Ugrino), dont la seule réalisation sera le tombeau de son frère, et qui finalement lèguera son nom à sa maison d’édition musicale. Toute sa vie, il alterne romans, théâtre, essais sur la musique, l’architecture, les noms de jeux, la bombe atomique. L’essentiel de son œuvre est aujourd’hui disponible aux éditions José Corti.